Les ACV et Emergy

Les ACV et Emergy

Les textes et schémas ci-dessous sont directement extraits d’un guide rédigé dans le cadre du projet de recherche pluridisciplinaire PISCEnLIT. Source et guide complet sont disponibles en bas de page.

L’Analyse du Cycle de Vie

 « L’Analyse du Cycle de Vie (ACV) est une méthode qui analyse les implications environnementales potentielles, les consommations d’intrants et les émissions polluantes associées à un produit ou à un service, tout au long de sa vie, depuis l’extraction des matières premières et son utilisation et jusqu’à sa mise en déchet ou son recyclage. Elle bénéficie d’un cadre normalisé ISO 14000.

Présentation du cycle de vie du poisson d’élevage
Présentation du cycle de vie du poisson d’élevage

Cette méthode est appliquée aux domaines de l’agriculture depuis la fin des années 1990 (depuis 2002 en aquaculture) et est toujours en cours de développement. Elle s’appuie sur le calcul d’un groupe d’indicateurs, appelés catégories d’impact, qui couvrent les principales questions environnementales et s’appliquent à différentes échelles d’espace locales, régionale ou globale. Ces catégories d’impact sont calculées par agrégation des différents produits émis ou consommés, proportionnellement à leur activité polluante potentielle.

Dans le domaine de l’aquaculture, les catégories d’impact utilisées fréquemment sont les suivantes :

  • l’eutrophisation, exprimée en kg d’équivalent phosphates (kg PO4-eq), qui évalue une dégradation potentielle du milieu aquatique par le déversement de substances nutritives (azotées et phosphorées) induisant une prolifération d’algues qui consomment l’oxygène disponible,
  • l’acidification, exprimée en kg d’équivalent dioxyde de soufre (kg SO2-eq), qui évalue l’acidification potentielle des sols et des eaux due à la production de molécules acidifiantes dans l’air, les sols ou les eaux,
  • le réchauffement climatique, exprimé en kg de dioxyde de carbone (kg CO2-eq), qui évalue la production de gaz à effet de serre par le système,
  • l’utilisation d’énergie, exprimée en Méga Joules (MJ), qui regroupe l’ensemble des ressources énergétiques utilisées,
  • l’utilisation de production primaire nette, exprimée en kg de carbone (kg C), qui reflète la pression sur la chaîne trophique par l’évaluation de la quantité de carbone issue de la photosynthèse nécessaire à la production d’une unité de poids de l’animal considéré,
  • la dépendance à l’eau, exprimée en m3, qui définit l’eau consommée ou qui transite par le système d’élevage durant la production dans le cas de l’aquaculture.

Toutes ces catégories d’impact sont calculées relativement à une unité fonctionnelle qui est généralement la tonne de poissons produite. Dans certains cas, il peut être intéressant d’utiliser des surfaces comme unité fonctionnelle, par exemple dans le cas des étangs.

L’utilisation de l’ACV dans les analyses de durabilité des systèmes agricoles et aquacoles, revêt plusieurs intérêts. La méthode permet de définir et de formaliser le système de production, ses différentes parties, ses limites et les flux de matières dont il est dépendant ou producteur. L’ACV permet de s’affranchir d’une perception locale des questions environnementales. La pluralité des catégories d’impact permet d’approcher la globalité des interactions avec l’environnement et d’analyser les relations entre les impacts notamment en suivant les risques de transfert de pollution entre impacts. Prises isolément, les catégories d’impact peuvent aussi servir d’indicateurs et venir enrichir des systèmes d’indicateurs de durabilité sociaux, économiques, environnementaux et de gouvernance.

EMERGY

L’Emergy est basée sur le principe thermodynamique de Lavoisier (rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme) et se définit comme la somme de toutes les formes d’énergie (directe et indirecte, renouvelable et non-renouvelable) nécessaires à la réalisation d’un service ou d’un produit. C’est une méthode d’analyse quantitative qui détermine la valeur des ressources, des services et des produits, exprimée dans une unité commune : l’Emergy solaire (seJ). La conversion des flux physiques (énergie, masse…) et des flux économiques se fait via l’utilisation d’un facteur de conversion appelé la transformité ou UEV (Unit Emergy Value), exprimée en seJ/J (ou en seJ/Unité). Ce facteur de conversion correspond au ratio de l’Emergy nécessaire pour produire un flux ou une unité de stock, sur l’énergie réelle de ce flux ou de ce stock.

Le principe de la méthode Emergy, exemple de la production de poissons en étang  (d’après Ortega, 2008 modifié par Wilfart et al. (2012))
Le principe de la méthode Emergy, exemple de la production de poissons en étang (d’après Ortega, 2008 modifié par Wilfart et al. (2012))

Cette méthode est appliquée à l’analyse des écosystèmes depuis le début des années 1980 et des systèmes aquacoles au début des années 2000. L’analyse repose sur une série d’indicateurs qui permettent d’identifier comment un système anthropisé s’insère dans son environnement et comment il valorise les ressources qui en sont issues. Ces indicateurs sont des rapports entre le flux d’Emergy total et les flux d’Emergy des différentes composantes du système (flux d’Emergy issus de la nature (renouvelable ou non renouvelable, gratuits), flux d’Emergy issu d’intrants achetés/importés dans le système ou entre différentes origines du flux d’Emergy (gratuit et naturel ou achetés et manufacturés)).

Les principaux indicateurs sont :

  • La transformité : elle s’exprime en seJ/J. Il s’agit du ratio entre le flux total d’Emergy qui transite dans le système et l’énergie des produits finaux du système,
  • Le rendement Emergy (Emergy Yield Ratio, EYR) : il s’agit du ratio entre le flux total d’Emergy qui transite dans le système et le flux d’Emergy issu des intrants achetés et importés dans le système,
  • le pourcentage d’Emergy renouvelable (% R) : cet indicateur reflète le pourcentage d’Emergy renouvelable dans le flux total d’Emergy,
  • La charge environnementale (Environmental Loading Ratio, ELR) : il s’agit du ratio entre le flux d’Emergy issu des ressources naturelles non renouvelables et des intrants importés d’une part et le flux Emergy provenant des ressources renouvelables d’autre part,
  • Le rendement d’investissement Emergy (Emergy Investment Ratio, EIR) : il s’agit d’un ratio entre le flux d’Emergy des intrants achetés et le flux d’Emergy issus des ressources naturelles (gratuites),
  • L’index Emergy de durabilité (Emergy Index of Sustainability, EIS) : cet indicateur est le ratio entre le rendement Emergy et la charge environnementale. Il met en évidence le compromis entre les avantages du processus étudié et la pression exercée sur l’environnement pour son obtention. »

Source : Aubin J., Rey-Valette H., Mathé S., Wilfart A., Legendre M., Slembrouck J., Chia E., Masson G., Callier M., Blancheton J.P., Tocqueville A., Caruso D., Fontaine P., 2014. Guide de mise en œuvre de l’intensification écologique pour les systèmes aquacoles © Diffusion INRA-Rennes, 131 p.

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